Le grand marin
Le grand marin est le premier livre écrit par Catherine Poulain. Un roman d’aventures en Alaska où se retrouve une jeune femme française venu de Manosque-les-Couteaux pour accomplir son rêve : pêcher.
Lili embarque bientôt sur le Rebel, un bateau équipé pour la pêche à la morue, au flétan et aussi au crabe dans la mer de Béring. Lili, d’apparence fragile, aux mains d’une vigueur étonnante, exécute les gestes précis des pêcheurs et devient leur égale en matière de pêche à la morue noire et au flétan. Les tâches les plus redoutables, elle arrive à les mener à bien en manipulant avec dextérité les outils des gens de mer. Elle installe les palangres, patauge dans la cale à glace pour préparer les appâts, tient la nuit son quart dans la timonerie, et de retour à terre, « peint la ville en rouge », c’est-à-dire, avale une quantité impressionnante de bières et de White Russians, n’aimant pas trop le whisky.
Les hommes, ils ont pour nom, Ian, le grand gars maigre, le skipper du Rebel, Jude, l’homme-lion à la carrure colossale, Jesse, Simon, et aussi Jason, Dave, Joey, John, Niképhoros et bien d’autres encore. Un compagnonnage apprécié de Lili, la greenhorn (la bleue). Lili apprend qu’ « embarquer, c’est comme épouser le bateau le temps que tu vas bosser pour lui », et pour elle, c’est une vie magnifique, la vraie vie. Au point de faire quelquefois des folies, comme de manger du poisson cru, cause d’un empoisonnement du sang.
Le grand marin, c’est Jude, un homme des bois qui a quitté les bois pour mieux gagner sa vie. Mais ce qui lui arrive de mieux dans sa vie, c’est la rencontre avec Lili. Lili qui reste obsédée par un autre rêve : aller jusqu’à Point Barrow, le bout du monde… et ensuite pêcher le crabe ; un défi pour une femme tant la pratique est dangereuse. Mais une skipper ne lui a-t-elle pas dit que l’important n’est pas d’avoir des muscles, mais d’avoir de la jugeote et de ne jamais lâcher ?
Le grand marin est un formidable roman sur le désir de s’épuiser et « la volupté de l’exténuement » ; une nécessité pour ces hommes de « la dernière frontière » qui veulent continuer à vivre. Un regard tissé de haute lisse par une femme à la parole rare, très souvent introduite par un « Oh… » révélateur d’une ingénuité délicieuse.
DULLA
Le cœur blanc
Catherine Poulain situe son second roman Le cœur blanc dans les Alpes-de-Haute-Provence, dans un village du côté de Pont de l’Aygues et du Pont des Mensonges où se retrouvent régulièrement des saisonniers venus pour la récolte des asperges, des melons, des cerises, des fraises, du tilleul, ou encore des vendanges, et plus tard des olives. Parmi ceux-ci deux femmes, Rosalinde, Rosa, la femme aux cheveux rouges à qui Ahmed dit : « Tu es courageuse. Tu as le cœur blanc », c’est-à-dire le cœur pur, et Mounia, Moonface, Luna pour Césario, le Portos, « Mounia l’été. Mounia le vent ».
L’intrigue du livre s’organise autour de ces paroles de femmes aux caractères différents et aux projets singuliers. L’angoisse de Rosa voulant sauvegarder sa liberté, qui a peur de son propre corps et du désir des hommes, et l’allégresse de Mounia toujours à la recherche de quelque chose de beau, peut-être Gibraltar. L’une et l’autre circulent parmi les hommes, le bar d’En Haut, le café du Commerce et les bières, tentant de conserver malgré le travail harassant dans les vergers et les vignes et des temps de repos qui n’en sont pas vraiment des flammèches de vie et des bribes d’espoir. Sans trop d’illusions cependant, car comme dit Rosa : « Nous vivons sous ce ciel en animaux domestiqués ».
Les hommes, ils sont nombreux à monter sur le plateau de la camionnette pour aller au travail, suivant un chiffre précis qui en laisse quelques uns chaque jour sur le bord de la route. Ils sont beaucoup à rêver des femmes et à jeter sur elles des regards fiévreux. Ils sont des « hommes de l’ombre » à la recherche d’un peu de joie au milieu des tourments. Au risque des violences. Car on boit beaucoup, et forcément le feu court dans les corps et les têtes ébranlés par des élans mortifères. Un feu qui embrasera l’horizon et laissera Mounia songer au « long voyage des bêtes et des hommes, leurs transhumances et leurs exodes… La mémoire secrète de chacun ». Rosa, elle, a disparu.
DULLA