Nouvelles Peu Exemplaires par François Vernet

Nouvelles Peu Exemplaires de François Vernet possède un titre de facture « picaresque » portant la trace de Cervantès et réunit cinq nouvelles écrites de 1940 à 1942. Le Vichy de la Révolution nationale, la ligne de démarcation entre zone occupée et zone libre, le comportement des hommes en temps de guerre sont la toile de fond des histoires racontées par le jeune auteur (il est né en 1917).

El Desdichado met en scène deux soldats de la Légion étrangère, un Français, Jean, et un Russe, Féodor, portés par le désir irrépressible d’agir pour que les Français transforment leur défaite en « la plus grande victoire de tous les temps, une victoire contre la haine ». En effet « c’est par le cœur qu’un pays survit ». L’amour du prochain et l’amitié des étrangers portent cette résolution généreuse et audacieuse dans une zone ravagée par le régime de Vichy.

Aller et retour place le narrateur en désir de Paris décidé à franchir la ligne. Des connaissances lui donnent à faire des commissions quelque peu étranges. En revenant il se perd et se retrouve en prison. La rencontre avec les autres encellulés le délivre d’une forme de désinvolture. Surgissent en lui des réflexions profondes et justes. Entre autres, celles-ci : « Il y a une chose qui, à tout jamais, vous donne la passion de la liberté, c’est de s’être une fois senti au pouvoir de l’arbitraire, sans aucun recours possible. »

L’apprenti maître chanteur est un homme qui réfléchit ; donc qui arrive en dernier. Mais dans cette époque de marché noir à Paris, il se veut chevalier, car « se faire complice d’une infamie pour vivre, c’est manquer d’imagination ». Alors, au milieu des nouveaux riches (et des faux), l’homme monte son affaire avec élégance… et humanité. Une affaire traitée avec une douce ironie. Ainsi dit-il : « M. Pellegrin n’était pas juif. Je m’en excuse, mais j’ai résolu de respecter en tout la vérité. »

Le trou (dans une cloison de bains douches) est l’occasion d’engager un dialogue entre deux personnages. Le trou comme symptôme de la présence des autres pour continuer à vivre malgré le désir de solitude. Mais pourquoi ne pas boucher le trou ?

Trois jeunes tambours en attente de franchir la ligne décident de se dire la raison de leur présence aux marches tourangelles. Trois chevaliers décidés à pénétrer dans le territoire dont le dragon a la garde, et en tant que tels prêts à prendre des risques. Mais jusqu’où iront-ils dans ce sentiment superbe, la sincérité ?

Les hormones du maréchal exposent un éloge du maréchalisme à travers le récit de la politique de reproduction nataliste nécessaire à la compensation des morts. Un récit effrayant de sottise tenu par un collaborateur, symbole de la bêtise du régime pétainiste. De quoi rendre résistant tout individu soucieux de dignité.

François Vernet mourra à Dachau au Revier en mars 1945 un mois avant la libération du camp sans avoir pu ouvrir les yeux sur son nouveau livre Vous ne mourrez nullement, mythe romanesque, que ses amis lui apportaient à son chevet.